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dossier Gottfried Semper, habiter la couleur

Introduction

Isabelle Kalinowski
p. 4-23

Texte intégral

1L’architecte allemand Gottfried Semper (1803-1879) a développé il y a un siècle et demi une réflexion sur les constructions humaines dont l’inventivité à la fois spéculative et empirique demeure aujourd’hui encore un objet d’étonnement pour ceux qui la découvrent ou en approfondissent l’analyse. C’est à une exploration de cette anthropologie de l’architecture que convie le présent numéro de Gradhiva, dont les textes éclairent sous différents angles la manière dont Semper a abordé, sans détours, des questions aussi simples et immenses que celles de savoir pourquoi on décore les édifices, comment naissent les ornements, à quelle fin les hommes construisent des murs, comment se nouent les relations entre les différents matériaux ou quel rapport unit la matérialité et les formes données aux constructions. Les articles présentés ici sont complétés par un choix d’extraits de l’œuvre maîtresse de Semper, Le Style (Der Stil, 1860 sq.), dont la plupart n’avaient encore jamais été traduits en français. Ces extraits inédits et les essais qui les précèdent se font écho à bien des égards.

2Lire Semper, c’est s’exposer à ne plus jamais regarder les édifices anciens et modernes de la même façon, et à faire désormais une expérience quotidienne insolite : une fois qu’on a pris connaissance de sa thèse centrale selon laquelle l’architecture trouve son origine dans le textile et importe dans une variété infinie de matériaux les principes formels, structurels et décoratifs des tressages, tapis ou tissus, on se surprend sans cesse à identifier, omniprésentes, des marques de la « textilité » des villes, à la surface des murs extérieurs et intérieurs, des cabanes ou palais, des vestiges antiques comme de bâtiments extrêmement contemporains. Sans donner nécessairement raison à Semper, parfois même en émettant à l’encontre de ses arguments des réserves de fond, on se laisse gagner par son obsession du textile ou du « revêtement », dont il a clamé la parenté intime avec le « vêtement », installant ainsi dans nos yeux un dispositif visuel d’attention à un « habillage » universel des cités des hommes et de leurs lieux de vie. Il est parfaitement possible de ne pas partager les conclusions de Semper tout en étant poursuivi par les questions qu’il a soulevées.

3L’un des traits les plus marquants de l’écriture sempérienne est de conjuguer une technicité parfois réelle, qui témoigne des préoccupations de celui qui conçut et réalisa effectivement des chantiers aussi fameux que ceux de l’opéra de Dresde, du Burgtheater de Vienne ou du Polytechnikum de Zurich, et une inspiration théorique dont il ne perdit jamais le fil et que le lecteur peu familier de la sémantique architecturale peut apprécier sans spécialisation aucune. La limpidité particulière des interrogations de Semper ne les destine pas seulement, loin s’en faut, à un public d’architectes et de théoriciens ou d’historiens de l’architecture. Le choix d’une focalisation sur l’anthropologie sempérienne, qui distingue ce numéro de Gradhiva d’autres publications récentes consacrées à l’architecte allemand, ne fait ainsi qu’expliciter un enjeu de l’œuvre qui reste perceptible dans chacune de ses pages et leur confère une actualité qu’elles n’auraient pas forcément au même titre si le propos de Semper avait été strictement architectural, historique ou érudit. De tous ces points de vue, en effet, ses écrits sont manifestement datés. Si cette œuvre que sa rhétorique assez cicéronienne et son ton presque un peu pompier ancrent dans un xixe siècle encore tout baigné des humanités scolaires rend ainsi un son curieusement neuf, c’est peut-être par la plasticité de certaines de ses propositions anthropologiques. L’image de la « hutte caraïbe », associée au modèle des Quatre Éléments de l’architecture (1851) (Die vier Elemente der Baukunst: ein Beitrag zur vergleichenden Baukunde) – le foyer, l’enclos, le toit et le terre-plein – n’est pas devenue célèbre par l’effet d’une simplification à outrance de la pensée de Semper mais parce qu’elle condense de façon parlante ses thèses sur les constructions humaines.

fig. 1 Gottfried Semper, Hutte caraïbe in Der Stil 1863, vol. II.

fig. 1 Gottfried Semper, Hutte caraïbe in Der Stil 1863, vol. II.

Photo © Universitätsbibliothek Heidelberg.

4Il n’est pas exclu que l’impression de proximité que peut parfois éveiller la découverte des analyses sempériennes ait quelque chose à voir avec ce que Pierre Bourdieu appelait, en la définissant comme une condition de possibilité de la réception d’une œuvre, une « homologie structurale » entre le contexte dans lequel elle a vu le jour et celui dans lequel on la lit : Semper, le transfuge, vécut de plein fouet la contradiction entre une position initiale d’architecte officiel et les errances labyrinthiques de l’exil ; il assista à l’agonie de la normativité d’un système classique organisé autour des « ordres » et au délitement historiciste de ses valeurs absolues ; il observa le passage entre le monde organisé des corporations artisanales et les expérimentations des « artistes industriels » à destination de nouvelles couches d’acheteurs ; notamment lors de la fameuse Exposition universelle de Londres, en 1851, il prit la mesure de la montée en puissance du capitalisme mondial et de ses effets non seulement sur les productions artistiques, architecturales et artisanales, mais aussi sur le choix et même l’invention de nouveaux matériaux et techniques appliqués à une production de masse (Semper 2012) ; il ne put ignorer les tensions entre son idéal d’éducation du goût populaire et l’infléchissement du marché architectural en fonction des attentes d’une nouvelle classe bourgeoise. Peut-être est-ce l’acuité particulière avec laquelle, sous l’effet notamment du bannissement et de la perte irrémédiable de son cadre familier, Semper perçut toutes ces contradictions, qui entre aujourd’hui en résonance avec des questionnements contemporains. La qualité très spécifique de la « culture » sempérienne, avec son mélange de technicité assumée et de classicisme de seconde main, les audaces théoriques qu’autorisait sa relative extériorité par rapport au monde académique et, enfin, son éclectisme sans limites, peut rappeler quelques traits bien connus de nous.

fig. 2 Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853), Maquette pour un salon de musique, peut-être celui de l’impératrice Joséphine à Fontainebleau, vers 1800.

fig. 2 Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853), Maquette pour un salon de musique, peut-être celui de l’impératrice Joséphine à Fontainebleau, vers 1800.

Crayon, encre et aquarelle, 12 × 18,5 × 14,4 cm.

Photo Craig Stevens. Avec l’aimable autorisation de Drawing Matter Collections.

5Né deux ans après la paix de Lunéville, en 1803, Semper étudia les mathématiques à l’université de Göttingen puis l’architecture à Munich, mais il vint achever sa formation à Paris, auprès de maîtres allemands, ou d’origine allemande, comme il était d’usage en ce temps-là : il fréquenta assidûment les ateliers de Jakob Hittorff (1792-1867) et de Franz Christian Gau (1790-1853), qui comptèrent dès lors parmi ses plus proches amis. Semper arriva à Paris en 1826, à 23 ans, et fut marqué à jamais par le climat enthousiaste de découvertes qui régnait alors dans les cercles qu’il fréquenta. C’est surtout Hittorff, futur architecte parisien de la place de la Concorde, du Cirque d’hiver ou encore de la gare du Nord, qui bouleversa sa vie en le convertissant à la « thèse de la polychromie ». Hittorff avait observé dès 1822 des traces de couleur sur les pierres du temple de Sélinonte, en Sicile, et c’est lui qui éveilla chez Semper le désir d’un séjour en Italie et en Grèce. Son périple sur les traces de l’Antiquité grecque et romaine, qui dura trois ans (1830-1833), fut entièrement polarisé par la quête de vestiges polychromes qu’il entreprit de déceler sur la colonne Trajane, sur les pierres du temple de Paestum ou encore celles du Parthénon. Il arpenta naturellement à de multiples reprises, à la suite de Hittorff, le site de Pompéi. Comme en témoignent les nombreux dessins à la mine de plomb ou aquarelles de Semper conservés aujourd’hui au gta-Archiv de l’École polytechnique de Zurich ou, à Paris, le carnet d’aquarelles de Hittorff appartenant à la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) et les grandes planches aquarellées de ce dernier qui font partie du fonds de dessins d’architecture du musée d’Orsay, le séjour en terres antiques fut pour l’un comme pour l’autre un moment de grâce où ils assistèrent à l’émergence archéologique, artistique et théorique de la couleur. Alors que les paysages sont assez peu évoqués dans les textes de ces deux auteurs, ils sont très présents dans leurs dessins personnels, longues plaines entrecoupées de temples antiques apposant sur l’espace leur marque multicolore ou monochrome (leur Parthénon était rouge).

fig. 3 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Antiochus et Stratonice, 1840, huile sur toile, 67 x 98 cm.

fig. 3 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Antiochus et Stratonice, 1840, huile sur toile, 67 x 98 cm.

Chantilly, musée Condé.

Photo © RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Harry Bréjat.

6Le coup de théâtre que représenta, dans le parcours de Semper, l’entrée en scène de la polychromie ne se résuma pas à une remise en cause de l’image classique de la blancheur de l’architecture et de la sculpture antiques, promue par Johann Joachim Winckelmann (1717-1768) dans son Histoire de l’art dans l’Antiquité (1764). L’enjeu n’était pas seulement la substitution d’une couleur plus vive à une teinte neutre, et il l’était d’autant moins que Hittorff n’était pas le premier à avoir relevé la présence de traces de polychromie sur les édifices et les sculptures antiques et à avoir rendu public ce constat. Sa singularité fut d’affirmer, envers et contre tout, non l’occurrence ponctuelle mais l’omniprésence d’un enduit de couleur sur les édifices antiques. Semper fut l’un des seuls à défendre l’entêtement chromatique absolu de son mentor ; cependant, il ne goûta guère les tentatives de revival polychrome entreprises à son époque, notamment en Allemagne, avec leur « style » oscillant entre « pâte d’amande » (Marzipanstil) et « rouge sang de boucher ». Il déclara dans l’essai publié à son retour d’Italie, les Remarques provisoires sur l’architecture et la sculpture polychrome chez les Anciens (1834), qu’il n’avait « nullement l’intention de convaincre ses contemporains de peindre séance tenante leurs édifices à la manière des anciens temples d’Athènes et de Sicile » (Semper 2007 : 55, trad. modifiée). Semper ne s’exposa pas aux mêmes revers que Hittorff, contraint en 1861, devant l’indignation des Parisiens du voisinage, de retirer les plaques de lave émaillée aux couleurs éclatantes (et aux personnages nus) qu’il avait installées sur la façade de l’église Saint-Vincent-de-Paul (Kiene 2011 : 30) et qui viennent seulement, en 2011, d’être replacées sous le portique de cet édifice (voir infra, p. 148).

fig. 4 Le dieu Hermès combattant un géant, frise du Parthénon, ve s. av. J.-C.

fig. 4 Le dieu Hermès combattant un géant, frise du Parthénon, ve s. av. J.-C.

Athènes, musée de l’Acropole.

Photo akg-images / IAM.

7Chez Semper, la commotion induite par l’irruption de la couleur alla plus loin qu’une contestation esthétique des conventions du goût classique. L’architecture polychrome de l’Antiquité n’était en aucun cas, pour lui, une version colorisée de l’architecture de l’Antiquité telle qu’on la connaissait déjà : avec Semper, la couche de couleur devint l’architecture de l’Antiquité. Semper reconstruisit tous les édifices à partir de cette surface polychrome. À son retour d’Italie, il était convaincu que celle-ci occupait le centre de l’architecture et que la fonction des différentes composantes et matériaux des constructions ne pouvait véritablement être comprise qu’en repensant entièrement les rapports de subordination entre « structure » et « décor » tels qu’ils étaient envisagés depuis la période classique. Une illustration exemplaire des renversements ainsi opérés par Semper fut la controverse qui l’opposa à l’historien d’art Franz Kugler (1808-1858) au sujet de l’emploi des plus beaux marbres blancs. Partisan d’une position modérée dans le débat sur la couleur dans l’Antiquité, Kugler, qui admettait son usage dans certains cas seulement, arguait qu’un matériau aussi précieux que le marbre de Paros, dont l’exquise blancheur était fameuse, ne pouvait pas avoir été acheminé à grands frais pour être ensuite badigeonné d’une couche de peinture (Kugler 1835 : 8). Semper lui rétorquait non seulement que la qualité d’un matériau n’impliquait pas nécessairement qu’on l’exposât aux regards (ce matériau rare pouvait par exemple demeurer caché mais être utilisé « en témoignage de respect envers une divinité » [Semper 1851 : 45]) mais aussi et surtout que la qualité du grain du marbre de Paros était recherchée justement parce qu’elle offrait un excellent fixateur aux couches de couleur. C’est la tenue de ces dernières qui devenait la finalité gouvernant tout le processus du choix des matières et de leur mise en place. Cette intuition du primat de la couleur fut la rupture majeure initiée par Semper.

fig. 5 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Mademoiselle Caroline Rivière (1793-1807), détail, huile sur toile, 100 x 70 cm.

fig. 5 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Mademoiselle Caroline Rivière (1793-1807), détail, huile sur toile, 100 x 70 cm.

Paris, Musée du Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojéda.

8La seconde grande innovation de Semper dans ce débat fut de corréler cette première thèse, en soi extrêmement nouvelle, à une autre proposition qui n’avait pas encore pris corps au moment où il publia ses premières Remarques de 1834, mais qui était en revanche pleinement aboutie lorsqu’il fut en mesure d’énumérer ses Quatre Éléments de l’architecture (1851) : la mise en relation de la couleur et du textile. Si la couleur était à tel point décisive dans la conception des bâtiments, c’est parce que, selon Semper, elle avait été à l’origine de l’architecture, d’abord constituée non de structures en dur mais de panneaux mobiles de tressages végétaux multicolores, de tapis ou encore de textiles suspendus, notamment ceux qui étaient utilisés comme cloisons temporaires dans les habitats mobiles des nomades. Les peintures murales et autres décors de revêtement en couleur portaient dans leurs formes et leur agencement la mémoire de cette origine textile. La couleur se trouvait ainsi corrélée non à la peinture entendue comme un des beaux-arts mais à l’art textile. L’architecture, cet art majeur, était ainsi assimilée au prolongement d’un art « technique » qui ne trouvait plus sa raison d’être dans sa subordination aux besoins de l’architecte mais devenait un mode d’expression fondamental de l’habitat humain. C’est ici que débutent les questions ouvertes par la série d’essais présentée dans ce numéro : comment formuler les hypothèses anthropologiques qui conduisirent Semper à affirmer un tel primat du textile et de sa couleur ? Quel statut leur attribuer, entre mythe des origines, propositions relatives aux impulsions fondamentales des hommes et de leurs sociétés, hypothèses sur l’origine des arts et de leurs hiérarchies ? Chacun des articles qui vont suivre répondra à sa façon à cette question clé, en éclairant cette déroutante irruption du textile coloré dans le paysage des constructions humaines.

9Dans le parcours de Semper, l’introduction si décisive de la référence au textile intervint après une rupture biographique de grande ampleur. Retourné en Allemagne en 1834 où il devint directeur de l’École d’architecture de Dresde et dessina au fil des ans aussi bien des édifices publics (Hoftheater, synagogue…) que des demeures privées, Semper connut un début de carrière brillant mais brutalement interrompu par un événement politique : le soulèvement révolutionnaire de Dresde en 1849, auquel il prit une part active aux côtés de son ami Richard Wagner, inaugurant dit-on à cette occasion un nouveau modèle de barricades. Son engagement républicain l’entraîna dès lors sur la voie de l’exil. Il se réfugia à Paris, songea à émigrer aux États-Unis mais s’installa finalement à Londres où, par l’intermédiaire de Henry Cole (1808-1882), il fut chargé d’enseigner au Department of Practical Art de la School of Designs. Il aménagea plusieurs sections du Crystal Palace pour l’Exposition universelle de Londres en 1851. Ce séjour en Angleterre le conduisit à approfondir sa connaissance des « arts industriels » jusqu’à déceler en eux la matrice des arts monumentaux et des « beaux-arts ». Élaboré durant cette période et achevé après son installation à Zurich, où, par l’intermédiaire de Wagner, Semper fut nommé professeur d’architecture en 1855 et chargé de la construction du nouveau bâtiment de l’université, le Polytechnikum, Le Style dans les arts techniques et tectoniques ou esthétique pratique : un manuel pour les techniciens, artistes et amateurs d’art (Der Stil in den technischen und tektonischen Künsten oder Praktische Ästhetik: Ein Handbuch für Techniker, Künstler und Kunstfreunde, 2 t., 1860 et 1863 ; 2e éd. en 1878) explore les fondements textiles de l’architecture en élargissant l’anthropologie de l’habitat à l’échelle du monde. Le premier volume, L’Art textile, élabore une histoire comparée du « principe du revêtement en architecture » qui décrit les rapports entre décor et structure du bâti dans différentes cultures et à différentes époques : « Nouvelle-Zélande et Polynésie ; Chine ; Inde ; Mésopotamie ; Phénicie et Judée ; Égypte. Ancien et Nouvel Empire ; Asie Mineure ; Grèce ; Grèce ; Rome ; époque chrétienne en Occident, en Orient ; Renaissance. » Cette investigation devait être élargie, dans un troisième volume de Der Stil que Semper n’eut pas le temps d’achever (Luttmann 2008), à des époques plus récentes (Moyen Âge, Renaissance, époque moderne) et à d’autres cultures, islamiques par exemple. Cette expansion de l’espace de référence de l’histoire de l’architecture fut un autre apport décisif de l’œuvre de Semper (voir dans ce numéro l’article de Céline Trautmann-Waller).

10Semper ne fut pas l’unique architecte du xixe siècle qui explora les métaphores textiles dans le discours architectural et les analogies entre bâti et tissu, mais il fut le premier à faire de cette mise en relation la clé d’une relecture complète de l’histoire de l’architecture. En réinventant une histoire des arts de la construction centrée sur des motifs textiles, Semper sema un rouble comparable (et sans doute apparenté, peut-être par l’intermédiaire de Hittorff qui était leur ami commun) à celui que Jean-Auguste-Dominique Ingres introduisit dans la peinture en composant des portraits dont une étoffe, les chatoiements d’un plissé, des accessoires métalliques semblaient devenir les véritables sujets. Pour l’un comme pour l’autre, il n’était pas question d’un basculement dans le décoratif, d’une apothéose de l’ornement : leur œuvre est au contraire tout entière tendue vers une réaffirmation des modèles classiques au moment même où ils sont redéfinis par leur « revêtement ». C’est la coïncidence déconcertante entre ces deux moments qui passionna Semper et Ingres : non pas détourner les yeux du Parthénon, mais fixer son regard sur sa couleur rouge (ou bleue). La frontalité pour laquelle opte Ingres dans son traitement d’« accessoires » qui avancent au premier plan des tableaux fait pendant à la manière dont Semper aborde, dans le premier tome de Der Stil, des domaines comme ceux de la fourrure, des cuirs ou de la passementerie : la présence des textiles s’impose, dans la construction des plans du texte, comme une strate dont la position n’a pas toujours l’évanescence d’une trace mémorielle mais peut au contraire parfois occuper toute la surface de l’argumentation. La position du « motif textile » n’est pas assignée une fois pour toutes par un dispositif d’analogie, ni de généalogie ; il occupe des plans dont on ne peut prévoir à l’avance l’agencement, et dont la configuration, comme chez Ingres, prend de court.

fig. 6 La cantatrice Wilhmine Schröder-Devrient indiquant à la foule le chemin du château depuis sa demeure sur la place du marché de Dresde lors de la Révolution de 1848.

fig. 6 La cantatrice Wilhmine Schröder-Devrient indiquant à la foule le chemin du château depuis sa demeure sur la place du marché de Dresde lors de la Révolution de 1848.

Gravure anonyme, 1848.

Photo akg-images.

11Les modèles sempériens de la polychromie et du « principe de revêtement » recelaient, comme l’a montré Estelle Thibault en retraçant la postérité de l’œuvre sempérienne dans le récent dossier de la revue Perspective consacré par Rémi Labrusse au textile (Thibault 2016), une ambiguïté dont sa réception porte la marque. La dimension textile de l’architecture pouvait être explorée dans des variations sur les entrelacs, l’entrecroisement des fibres ou le « bref d’armure » (la « représentation simplifiée, sous forme de dessin quadrillé, du motif d’entrecroisement des fils de chaîne et de trame des tissus à texture rectiligne » [Thibault 2016 : 123]) ; mais le modèle du revêtement textile pouvait aussi entraîner sur la voie d’un conflit, voire d’une dissociation entre la structure constructive et son « habillage », interprétés selon les cas comme le signe de l’absence d’un lien organique entre le bâti et l’ornement (dénoncé par Karl Bötticher ou, sur un autre mode, par Eugène Viollet-le-Duc) ou comme l’heureux apport d’un vêtement venu protéger pudiquement la « peau nue » de l’édifice (Chatterjee 2009, à propos de John Ruskin). De la même façon, la polychromie pouvait s’imposer par imprégnation ou teinture de l’ensemble des matériaux de la construction, ou être apposée à la surface de ces derniers, comme on l’a vu avec l’exemple de l’adjonction de peintures murales sur des marbres précieux. Ces différentes directions de lecture n’ont pas seulement été des orientations de la réception mais étaient déjà conjuguées avec virtuosité dans les textes de Semper.

  • 1 Traduction d’Isabelle Kalinowski avec la collaboration d’Estelle Thibault, de Patricia Falguières, (...)
  • 2 Ce colloque, qui faisait suite à un séminaire animé pendant plusieurs années à Paris (EHESS/INHA) p (...)
  • 3 Je remercie ici vivement Valérie Loth et Maïra Muchnik pour la qualité de leur travail sur les imag (...)

12La réception internationale de Semper a surtout été promue, au cours des dernières décennies, par les travaux de Wolfgang Herrmann et de Harry Francis Mallgrave, qui ont édité en 1989 le recueil The Four Elements of Architecture and Other Writings, longtemps demeuré l’ouvrage de référence pour ceux qui n’avaient pas accès aux textes allemands. Mallgrave a publié en 1996 une biographie de Semper puis, en 2004, sous l’égide de l’Institut Getty, une traduction anglaise du monumental Style, qui réunit en un seul volume les deux tomes de Der Stil et offre une vision d’ensemble de la structure de cet opus magnum, dont l’original allemand est également consultable en version numérisée (voir le site de l’université de Heidelberg). Avant et après cette parution, la revue RES: Anthropology and Aesthetics a publié régulièrement des articles sur les apports de Semper à une anthropologie de l’architecture (de Spyros Papapetros notamment). L’Institut d’histoire et de théorie de l’architecture de Zurich, le gta, qui conserve les archives de Semper, a plus récemment lancé un projet d’édition critique numérique de Der Stil animé par Sonja Hildebrandt et Michael Gnehm, qui offrira l’occasion d’exploiter le riche fonds d’archives et d’images laissé par Semper. En France, on disposait depuis 2007, sous le titre Du Style et de l’architecture : écrits 1834-1869, d’une anthologie de textes de Semper traduits en français très intelligemment conçue par Jacques Soulillou, livrant d’excellents aperçus sur son œuvre et certains de ses textes majeurs (en particulier Les Quatre Éléments de l’architecture et des extraits significatifs de Der Stil). À présent, c’est l’intégralité du Style, riche d’un bon millier de pages, qui est en train d’être traduite en français : les extraits donnés ici en fin de volume présentent la primeur de cette publication dont la parution est prévue pour 2018 aux Éditions d’en bas (Lausanne1). Le premier colloque français consacré à Semper a eu lieu en janvier 2016 à l’initiative de Caroline van Eck, Patricia Falguières et Odile Nouvel, éveillant l’intérêt d’un public nombreux ; c’est cette manifestation qui a été à l’origine du projet de ce numéro2. Le parti pris iconographique adopté ici apporte un éclairage sur le monde visuel de Semper tout en ouvrant largement la perspective sur des architectures, arts et objets plus contemporains3. L’actualité du propos sempérien est ainsi soulignée : sa réflexion sur l’entrée dans une ère de reproductibilité des objets et ce qu’il n’appelle pas encore le « kitsch », la postérité de ses propositions architecturales, l’apport crucial de sa pensée à une approche innovante des patrimoines anciens et de leur préservation (qui a pu être mise en regard de celle de Viollet-le-Duc [Gnehm 2006-2007]) et, plus généralement, la fécondité de son anthropologie de l’objet peuvent inspirer aujourd’hui beaucoup de nouvelles lectures.

13L’article de Caroline van Eck qui ouvre ce numéro est un commentaire des deux sections peut-être les plus fameuses de Der Stil, les § 59 et 60, dont une nouvelle traduction est proposée à la fin de ce volume. Dans une longue note programmatique de la section 60, Semper assimile le revêtement à un « masque » et explique son omniprésence par une anthropologie du « jeu masqué » (« La fumée des bougies de carnaval est la vraie atmosphère de l’art » [infra, p. 127]). L’art naît du plaisir que les hommes prennent à revêtir des déguisements, qui procède en fin de compte d’un besoin de négation de la réalité et de la matérialité. La pulsion de théâtralisation ainsi promue au rang de moteur de l’activité créatrice, que Caroline van Eck illustre par l’interprétation subtile d’une référence de Semper à Shakespeare, était déjà structurante dans plusieurs dessins du séjour en Italie reproduits ici (voir infra, p. 246), où le paysage ou décor architectural était littéralement « mis en scène » en faisant son apparition entre deux colonnes ou par-delà un tronc d’arbre. L’affinité remarquable de Semper architecte (comme de Hittorff) avec les chantiers de théâtres et d’opéras (le Festspielhaus de Bayreuth fut une adaptation par Wagner d’un projet initialement conçu par Semper pour Munich) s’inscrit dans la continuité directe de cette anthropologie du masque.

fig. 7 Raoul Dufy, La Pêche, vers 1919, gouache sur papier, dessin répété.

fig. 7 Raoul Dufy, La Pêche, vers 1919, gouache sur papier, dessin répété.

Musée des Beaux-Arts de Nice © ADAGP, Paris 2017. Photo Muriel Anssens © Ville de Nice Musée des Beaux-Arts.

14Dans un article qui fournit un apport de premier plan aux débats sur la place de Semper entre « matérialisme » et « idéalisme », Rémi Labrusse replace l’œuvre de celui-ci dans le cadre d’une histoire de la pensée de l’ornement au xixe siècle, en comparant son approche avec celle de son contemporain Karl Bötticher (1806-1889). Ornemaniste et dessinateur industriel, celui-ci chercha à promouvoir une normativité de la langue ornementale, dominée par un modèle grec fortement décontextualisé, « un monde musical d’arabesques et de formes géométriques planes, strictes compositions de lignes et de couleurs sans matière, sans histoire et sans lieu » (infra, p. 58). Semper fut profondément marqué par l’œuvre de Bötticher, notamment par La Tectonique des Hellènes (1852), et par la place qu’elle accordait à l’ornement (y compris textile), et le début de Der Stil semble partager ses orientations formalistes, avec les développements sur l’eurythmie et la symétrie des ornements (tels les cristaux et flocons de neige). Dans la suite de Der Stil, cependant, Semper prit nettement ses distances avec la métaphysique de l’ornement de Bötticher : alors que celui-ci mettait en avant l’autoréflexivité de l’ornement qui, en renvoyant à lui-même plutôt qu’à une quelconque réalité extérieure, en devenant l’allégorie de lui-même, attestait l’autonomie idéelle des constructions humaines, Semper définit ce qu’il appela « le style » comme un rapport spécifique, historiquement articulé, entre ornementation, geste technique et matériau. Si la figure humaine est à bien des égards absente de l’œuvre sempérienne (comme de l’iconographie choisie pour ce numéro), la main productive ne cesse d’y affirmer ses droits.

15En cherchant à cerner la manière dont il conçoit le mur, sa genèse et ses fonctions, Isabelle Kalinowski s’interroge sur le statut, chez Semper, d’un récit des origines de l’architecture qui s’inscrit dans la continuité de Vitruve et, à l’époque moderne, de l’abbé Laugier, mais se construit à partir d’une herméneutique inédite : l’auteur des Quatre Éléments de l’architecture articule une pratique résolue de l’enquête archéologique de terrain et une conscience aiguë du caractère fictionnel de toutes les scènes primitives de l’architecture. Sa déconstruction du mur de pierre au profit de l’enclos végétal tressé et son insistance sur la mobilité des nattes composant ce dernier peut-elle être rattachée à une lignée philosophique soucieuse de dévoiler l’arbitraire des limites instaurées (notamment celles de la propriété) ? La réponse apportée à cette question est ici négative.

16Si ces trois articles invitent à nuancer fortement la vision convenue d’un Semper « matérialiste », celui de Michael Gnehm avance quant à lui une hypothèse forte pour expliquer certains traits caractéristiques de l’approche sempérienne de la matière : cette conception serait redevable à un habitus protestant (au sens de Max Weber) faisant peser sur l’ici-bas le soupçon d’une corruption fondamentale. C’est une réserve de nature théologique à l’égard de la matière déchue qui motiverait en fin de compte, chez Semper, la thèse anthropologique assimilant l’architecture et les arts à un jeu de masques. Michael Gnehm montre que cette impulsion revêt chez lui la forme raffinée d’une pensée du « métabolisme » ou du processus de transition d’un matériau dans un autre, dans lequel la plasticité du métal joue fréquemment le rôle de chaînon intermédiaire : la matière est niée en étant habillée d’une autre matière ou transposée dans celle-ci.

17Céline Trautmann-Waller aborde quant à elle la question de l’apport de Semper à une « esthétique globale », à un « décloisonnement » de l’histoire des arts et à une ouverture aux arts non-européens par-delà l’exotisme. Elle revient sur les antécédents allemands d’un tel mouvement, sur les enseignements suivis par Semper à Göttingen, mais aussi sur les découvertes de Franz Christian Gau en Égypte et Nubie, ou de Paul-Émile Botta et Austen Henry Layard dans leur quête des monuments assyriens : l’architecte en exil put examiner dès 1849 à Paris, grâce à Charles Blanc, les bas-reliefs en albâtre rapportés par Botta de Khorsabad, avant qu’ils ne soient présentés au public l’année suivante. La place de Semper dans le contexte d’émergence d’une réflexion sur la « culture matérielle » est ainsi réévaluée, notamment par le biais d’une évocation conjointe de la figure de Gustav Klemm, chargé en 1833 de réorganiser les collections royales de porcelaine de Dresde et dont le travail constitua pour Semper une source d’inspiration majeure.

18Muriel van Vliet clôt cette série d’essais en éclairant, dans une perspective historique élargie, l’insertion de Semper dans la lignée de pensée « morphologique » qui s’ouvre au début du xixe siècle avec La Métamorphose des plantes de Goethe et les travaux des frères Humboldt et se poursuit au xxe siècle, par-delà l’œuvre de Semper, jusqu’à Georg Simmel, Ernst Cassirer, Aby Warburg ou encore Edgar Wind. Dès son arrivée à Paris, à partir de 1826, Semper avait étudié les collections naturalistes du Jardin des plantes ; par la suite, il prêta la plus grande attention au débat entre Georges Cuvier et Étienne Geoffroy Saint-Hilaire devant l’Académie des sciences (1830). À l’écart de tout formalisme abstrait, la morphologie met l’accent sur le dynamisme de la transformation d’un type originaire, qui peut être observé dans la nature mais aussi dans les processus de création artistique. L’expansion « radiale » (plutôt que linéaire) d’une forme primitive autorise d’infinies innovations, à condition du moins qu’elle ne dérive pas vers le mode de reproduction mécanique dont la généralisation à l’époque industrielle induit, déplore Semper, la perte du style.

fig. 8 Gottfried Semper, Dessin d’un arbre [Italie ?], 1833.

fig. 8 Gottfried Semper, Dessin d’un arbre [Italie ?], 1833.

gta Archiv/ETH Zurich, Gottfried Semper.

19Les textes extraits du premier tome de Der Stil présentés en appendice de ce numéro permettront d’apprécier l’ampleur et la diversité des problématiques explorées par Semper, dont les articles ici réunis livrent de riches aperçus. Entre la première traduction – une réflexion presque formaliste sur les ornements en rangées et bandeaux, qui s’achève inopinément sur une analyse du drapeau américain – et la dernière – qui témoigne de l’émerveillement de Semper, à la Bibliothèque impériale de Paris, face à une collection d’aquarelles représentant des architectures chinoises –, l’écart est grand et donne la mesure du large spectre de sa curiosité ; le second extrait, un développement sur les peaux, cuirs, fourrures, masques et tatouages, le troisième, une brillante improvisation sur le style des objets en caoutchouc, ou encore le quatrième, une réflexion sur les pratiques de la teinture et de la coloration, attestent, à l’instar des traductions des deux textes commentés par Caroline van Eck, la saveur si singulière de l’écriture de Semper et l’ampleur théorique d’une pensée de part en part colorée de matière.

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Notes

1 Traduction d’Isabelle Kalinowski avec la collaboration d’Estelle Thibault, de Patricia Falguières, d’Odile Nouvel et de Caroline van Eck.

2 Ce colloque, qui faisait suite à un séminaire animé pendant plusieurs années à Paris (EHESS/INHA) par Caroline van Eck, Patricia Falguières et Odile Nouvel, était intitulé « L’industrie de l’art. Gottfried Semper, l’architecture et l’anthropologie dans l’Europe du xixe siècle » ; il a eu lieu les 13 et 14 janvier 2016 au musée d’Orsay, à l’INHA et au Centre allemand d’histoire de l’art.

3 Je remercie ici vivement Valérie Loth et Maïra Muchnik pour la qualité de leur travail sur les images.

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Table des illustrations

Titre fig. 1 Gottfried Semper, Hutte caraïbe in Der Stil 1863, vol. II.
Crédits Photo © Universitätsbibliothek Heidelberg.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 140k
Titre fig. 2 Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853), Maquette pour un salon de musique, peut-être celui de l’impératrice Joséphine à Fontainebleau, vers 1800.
Légende Crayon, encre et aquarelle, 12 × 18,5 × 14,4 cm.
Crédits Photo Craig Stevens. Avec l’aimable autorisation de Drawing Matter Collections.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 960k
Titre fig. 3 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Antiochus et Stratonice, 1840, huile sur toile, 67 x 98 cm.
Légende Chantilly, musée Condé.
Crédits Photo © RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Harry Bréjat.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 652k
Titre fig. 4 Le dieu Hermès combattant un géant, frise du Parthénon, ve s. av. J.-C.
Légende Athènes, musée de l’Acropole.
Crédits Photo akg-images / IAM.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 1,2M
Titre fig. 5 Jean-Auguste-Dominique Ingres, Mademoiselle Caroline Rivière (1793-1807), détail, huile sur toile, 100 x 70 cm.
Légende Paris, Musée du Louvre.
Crédits Photo © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojéda.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 960k
Titre fig. 6 La cantatrice Wilhmine Schröder-Devrient indiquant à la foule le chemin du château depuis sa demeure sur la place du marché de Dresde lors de la Révolution de 1848.
Légende Gravure anonyme, 1848.
Crédits Photo akg-images.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
Titre fig. 7 Raoul Dufy, La Pêche, vers 1919, gouache sur papier, dessin répété.
Crédits Musée des Beaux-Arts de Nice © ADAGP, Paris 2017. Photo Muriel Anssens © Ville de Nice Musée des Beaux-Arts.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 1,8M
Titre fig. 8 Gottfried Semper, Dessin d’un arbre [Italie ?], 1833.
Crédits gta Archiv/ETH Zurich, Gottfried Semper.
URL http://journals.openedition.org/gradhiva/docannexe/image/3356/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 1,2M
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Pour citer cet article

Référence papier

Isabelle Kalinowski, « Introduction »Gradhiva, 25 | 2017, 4-23.

Référence électronique

Isabelle Kalinowski, « Introduction »Gradhiva [En ligne], 25 | 2017, mis en ligne le 31 mai 2017, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/gradhiva/3356 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gradhiva.3356

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Auteur

Isabelle Kalinowski

CNRS/ENS
isabellekalinowskimoncassin@gmail.com

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